Scission partielle suivie d'une vente d'actions: pas d'abus

Réorganisation de sociétés/ jurisprudence

Réorganisation de sociétés / jurisprudence

Scission partielle suivie d’une vente d’actions : pas d’abus 


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Les scissions partielles immobilières, suivies d’une cession d’actions de la société immobilière issue de la scission, font l’objet d’une attention particulière de l’administration fiscale belge. Ces opérations sont en effet considérées comme potentiellement abusives. Le Tribunal de première instance d’Anvers a rendu un jugement intéressant le 25 mars 2024, donnant raison à un contribuable dans une affaire de scission partielle suivie de la cession des actions de la société immobilière résultant de la réorganisation.

Ce jugement met en lumière l'importance des motifs économiques valables et des faits juridiques distincts dans l’évaluation de telles opérations au regard des mesures anti-abus applicables.

 L’administration fiscale a interjeté appel contre ce jugement qui lui est défavorable. Affaire à suivre.


FAITS

Une holding belge (‘HoldCo’) contrôlait un groupe multinational détenant un parc immobilier.

Dans le cadre d’une réorganisation, le groupe a décidé de scinder les activités opérationnelles et la détention des biens immobiliers en entités distinctes. L'objectif consistait à mettre en place une structure d'exploitation unique par région géographique, et une société immobilière distincte pour chaque site d’exploitation. 

À ce titre, une société belge B a transféré ses activités opérationnelles à une nouvelle entité (N) par scission partielle, tout en conservant ses immeubles et devenant par conséquent une société purement immobilière.  

Les actions de B ont ensuite été cédées par HoldCo à un investisseur tiers. HoldCo a réalisé à cette occasion une plus-value sur les actions B. HoldCo a revendiqué l’exonération totale de ces plus-values.   

CONTESTATION PAR L'ADMINISTRATION FISCALE

L'administration fiscale belge a refusé à HoldCo le bénéfice de l'exonération de la plus-value sur actions réalisée à l’occasion de la vente de B.  

The Belgian tax authorities argued that the transaction constituted a ‘non-genuine arrangement’ under the specific anti-abuse measure from the ‘Parent-Subsidiary’ Directive, as well as a ‘tax abuse’ under the general Belgian anti-abuse rule.

L’administration fiscale belge a invoqué que l'opération constituait un "montage non authentique" au sens de la mesure anti-abus spécifique issue de la directive "mère-filiale", ainsi qu'un "abus fiscal" selon la disposition anti-abus générale belge. Toujours selon l’administration fiscale belge, il s'agissait en réalité d'une vente de biens immobiliers dans le cadre d'une opération de "sale and lease back", juridiquement structurée en une scission de la société en deux entités, B et N, suivie de la vente des actions de B.  

Aux yeux de l’administration fiscale, une telle construction était motivée par des considérations purement fiscales visant l'exonération totale et définitive de la plus-value réalisée (au lieu d’une vente d’actifs). 

HoldCo a porté le litige devant le tribunal de première instance d'Anvers. 

CONCLUSIONS DU TRIBUNAL

Le Tribunal a rejeté les arguments de l’administration fiscale pour plusieurs raisons:

Absence de montage non-authentique / de caractère artificiel :

  • • La scission partielle était soutenue par des motifs économiques valables, conformément à la stratégie de réorganisation du groupe. Cette stratégie, documentée dans les procès-verbaux, visait à séparer la détention et l’exploitation des immeubles.
  • • Le produit de la vente des actions a été utilisé pour obtenir un emprunt bancaire et réinvesti dans des actifs amortissables, renforçant le caractère économique de l’opération.
  • • La vente d’actions, plutôt que des immeubles eux-mêmes, permettait d’éviter la renégociation des contrats existants, ce qui représentait une décision économiquement rationnelle.

Mesure générale anti-abus non applicable :

  • • Le Tribunal a rappelé que l’administration fiscale belge ne peut requalifier des actes juridiques pour modifier les faits établis. La requalification envisagée aurait impliqué de considérer que la holding avait vendu directement les immeubles, ce qui était contraire à la réalité juridique et économique. 

Le jugement est défavorable à l’administration fiscale. Celle-ci a interjeté appel contre le jugement. 

COMMENTAIRE SYNTHETIQUE

Cette décision met en lumière plusieurs enseignements importants : 

    1. Motifs économiques et documentation : il est très important de clairement énoncer les motifs économiques justifiant une opération de restructuration. La présence de tels motifs, combinée à un usage économique des fonds issus de la cession, constitue un élément central dans le cadre de la discussion. 
    2. Personnalité juridique distincte : le tribunal a réaffirmé que l’administration fiscale ne peut ignorer la séparation juridique entre les entités du groupe pour requalifier une opération. Ce principe protège les groupes contre des requalifications fiscales excessives
    3. Prudence fiscale dans les restructurations : Bien que cette décision soit favorable au contribuable, elle souligne également la méfiance de l’administration fiscale à l’égard des scissions immobilières suivies de cessions. Les décisions anticipées encadrent strictement ces opérations, en exigeant notamment le réinvestissement des produits de cession dans l’activité subsistante

L’administration fiscale ayant interjeté appel, un arrêt sera rendu sur cette affaire. Cette affaire est à suivre, car l’arrêt pourrait formuler de nouvelles précisions quant aux limites de l’administration fiscale sur les possibilités de requalification fiscale des scissions immobilières. 

Pour l’heure, ce jugement apporte un éclairage intéressant pour les sociétés souhaitant procéder à ce type de réorganisation.




​                                Date: 12/12/2024


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