La déductibilité fiscale appliquée aux options sur actions et aux warrants

Arrêt de la Cour d’appel d’Anvers du 17 septembre 2024

La déductibilité fiscale appliquée aux options sur actions et aux warrants 

Arrêt de la Cour d’appel d’Anvers du 17 septembre 2024


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  • La déduction fiscale des frais relatifs à l'octroi d'un plan d'options sur actions à un dirigeant peut être remise en cause en l’absence de mentions adéquates dans un procès-verbal de l’assemblée générale des actionnaires de la société octroyant les actions ;
  • Les mentions formelles dans le procès-verbal de l'assemblée générale ne suffisent pas, en tant que telles, si elles ne sont pas accompagnées de justifications économiques substantielles  de la réalité de prestations du dirigeant, sources de sa rémunération ; 
  • Des divergences apparaissent dans la jurisprudence sur cette question. La tendance s’oriente vers l’exigence d’explications très circonstanciées quant à la contrepartie de l’octroi d’options.  
1. CONTEXTE

La déductibilité fiscale des dépenses supportées par une société n’est pas automatique. Cette déductibilité requiert notamment que les dépenses soient réelles, sincères, et supportées en vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables (dans le cadre général de l’application de l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992, ci-après « CIR »). 


La déductibilité des rémunérations des dirigeants, spécifiquement lorsqu’ils bénéficient d’avantages en nature mis à charge de la société, fait fréquemment l’objet de discussions. La Cour de cassation en a précisé les contours dans deux arrêts du 14 octobre 2016, aboutissant à ce que l’on appelle la théorie de la rémunération. Selon la Cour de cassation, la déduction de ces frais est subordonnée à la production de la preuve que les frais supportés par la société pour octroyer l’avantage de toute nature au dirigeant concerné constituent la contrepartie de prestations réelles, exécutées par ce dirigeant au profit de la société.


La jurisprudence des cours et tribunaux publiée à propos de cette matière concerne principalement les litiges fiscaux portant sur les frais relatifs à la mise à disposition d’un bien immobilier par la société (en général unipersonnelle) à son dirigeant. La discussion s’est élargie aux frais liés aux stock-options (notamment dans une situation de plan miroir). 


Plusieurs jugements aboutissent à requérir l’existence d’un procès-verbal de l’assemblée générale des actionnaires de la société, exposant dans le détail la politique de rémunération de son dirigeant.


La Cour d’appel d’Anvers du 17 septembre 2024 s’inscrit dans cette lignée.


2. ARRÊT DE LA COUR D’APPEL D’ANVERS DU 17 SEPTEMBRE 2024

2.1 Les faits 

Une société avait attribué des options sur actions à son dirigeant à titre d’avantage de toute nature. 


L’administration fiscale a rejeté la déduction des dépenses liées à ces options sur actions en estimant que celles-ci n’avaient pas été supportées en vue de réaliser ou de conserver des revenus imposables. 


En première instance, le juge a considéré que les dépenses litigieuses étaient déductibles car elles s’inscrivaient dans la politique de rémunération du dirigeant, comme en témoignaient, selon lui, les procès-verbaux de l’assemblée générale. Toutefois, nous soulignons que l’octroi des options sur actions n’était pas mentionné explicitement dans les procès-verbaux. 


L’administration fiscale a interjeté appel contre ce premier jugement. 


2.2 Décision de la Cour d’appel d’Anvers  - rappel des bons usages

La Cour d’appel d’Anvers rappelle qu’il appartient à la société de démontrer que les frais relatifs aux options sur actions ont été exposés ou supportés en vue d’obtenir ou de conserver des revenus imposables et que ceux-ci ne seront déductibles que s’ils correspondent à des prestations effectives du dirigeant. 


La Cour d’appel considère que cette preuve n’est pas apportée en l’espèce pour les raisons suivantes : 

  • Les mentions effectuées dans les procès-verbaux de l'assemblée générale de la société étaient purement formelles et générales, n’évoquant pas en tant que telles les options sur actions ; elles ne démontrent pas que les options sur actions litigieuses ont été accordées pour rémunérer des prestations réelles du dirigeant ;
  • Il n’y a pas de cause économique exprimée quant à l’octroi des options ; 
  • Le fait que des fiches de rémunération aient été établies pour l’octroi des options sur actions et déclarées à l’impôt des personnes physiques n’est pas non plus une preuve suffisante.


Selon la Cour d’appel d’Anvers, l’attribution d’un avantage de toute nature doit être accompagnée de justifications substantielles, telles qu’une analyse coûts-bénéfices liés à cette attribution, une estimation des coûts ou revenus futurs de la société, un exposé des objectifs à atteindre par le dirigeant ou des analyses financières.


3. PERSPECTIVES… 


Compte tenu du caractère sensible de cette question, il ne serait pas étonnant de voir, à l’avenir, des décisions contradictoires prononcées par d’autres juridictions. 


Notons, par exemple, un arrêt de la Cour d’appel de Gand, rendu le 15 juin 2024 . Il ressort de cette décision que la société était parvenue à apporter la preuve exigée en établissant, dans les procès-verbaux de l’assemblée générale, un lien entre l’avantage de toute nature attribué, d’une part, et le chiffre d’affaires réalisé par la société, d’autre part.  En outre, la rémunération octroyée au dirigeant apparaissait proportionnelle aux prestations effectuées.


Constatant les divergences et la tendance traduite notamment par l’arrêt commenté ici, nous ne pouvons que recommander de veiller à intégrer dans les documents relatifs à l’octroi d’options toutes les justifications économiques relatives à la contrepartie des options octroyées.




​                                Date: 12/12/2024


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